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Alors que l’économie française donne de fragiles signes de reprise, les entreprises de TP s’enfoncent dans la crise : elles sont aujourd’hui 20% en dessous de leur niveau d’activité de 2007 (point haut de la conjoncture) et ont perdu près de 9 MD€ de chiffre d’affaires, quand l’économie française vient juste de retrouver son niveau d’avant le déclenchement de la crise (PIB : +0,6% 2013/2007 en volume).
Les entreprises de notre secteur sont en danger :
La situation à fin 2012 était déjà très mauvaise avec un taux de marge net moyen de 1,8 %, 20% des entreprises affichant des pertes, une trésorerie nette descendue à 17,7 jours de production (22,4 en 2009). Les chiffres de 2013 ne sont pas encore connus mais outre la baisse du chiffre d’affaires, plusieurs éléments laissent anticiper une dégradation de la situation financière des entreprises :
Trois facteurs d’explication à cette situation :
Tout indique que 2014 sera pire que 2013 et ce ne sont pas les dernières annonces concernant l’écotaxe qui vont nous rassurer.
Nous anticipons une baisse du chiffre d’affaires des entreprises de Travaux Publics de 4% en 2014. Cette prévision s’appuie sur une analyse par grande famille de clients. La dégradation pourrait même être bien plus accentuée dans certaines régions rurales.
Les premiers d’entre eux sont les collectivités locales. Sur 100 € de chiffre d’affaires TP, elles représentent 44 € dont 34 issus du bloc communal et 8 issus des départements. Tout concourt à la chute de leur demande que nous estimons à -8% :
Deuxième groupe de clients par leur importance, le secteur privé : presque 1 € sur 3 de chiffre d’affaires des entreprises du secteur. Il s’agit de tous les travaux qui accompagnent la construction de bureaux, de commerces, de logements ou d’équipements industriels. La légère reprise de l’économie française ne devrait pas permettre d’endiguer la baisse de la demande du secteur privé à nos entreprises. Nous anticipons une baisse de 4%.
Troisième groupe de client, les grands opérateurs qui sont les seuls susceptibles de tirer l’activité en 2014 avec une hausse de leur demande de 3%. Sous cet intitulé, se trouvent plus du cinquième de l’activité des Travaux Publics. Il s’agit par exemple des travaux réalisés par nos entreprises pour le compte des filiales d’EDF, RTE et ERDF, de la SNCF et RFF, également tous les travaux de transport en commun :
Le pic d’activité lié à la construction des quatre lignes de LGV sera atteint en 2014. Le volume de travaux pourrait atteindre 2,6 Md€. Cela correspond à 6% de l’ensemble de l’activité des Travaux Publics en France. Au total sur la période 2010-2015, les quatre LGV représentent 9 Md€ de travaux. En 2014, 20 000 salariés (15 000 emplois directs soit 6% des effectifs des Travaux Publics) seront associés à ces chantiers. Après ce pic, les besoins en main d’œuvre seront divisés par trois en 2016 avec l’achèvement des travaux.
Pour ce qui de la régénération des réseaux ferroviaires, l’accélération des investissements est progressive tandis que les investissements dans le domaine électrique se maintiennent.
Pour finir ce tour d’horizon par grand client, venons-en à l’Etat. Comme client direct, l’Etat compte peu : un peu plus de 3% de l’activité essentiellement dans le domaine des routes et des ouvrages d’art qui vont avec. 2014 est l’an 1 de la mise en œuvre des recommandations de la commission Mobilité 21 et des nouveaux contrats de plan 2014-2020. Compte tenu du projet de loi de finances, des autorisations d’engagement des années précédentes et des dernières annonces en matière d’écotaxe, nous faisons une hypothèse, plutôt optimiste dans le contexte actuel, d’une stabilité des commandes directes de l’Etat à notre secteur.
Je voudrais m’arrêter un instant sur les conséquences des choix de l’Etat sur l’activité des entreprises de Travaux Publics.
Pour commencer les choix budgétaires. Certes comme client direct son rôle est secondaire, mais ses décisions concernant l’Agence de financement des infrastructures (AFITF) et les dotations aux collectivités impactent fortement les entreprises de TP.
Baisse des ressources de l’AFITF
L’Agence est le bras armé de l’Etat pour financer les projets d’infrastructure d’importance nationale ou locale. La commission Mobilité 21 a acté que son budget devait rester a minima constant à son niveau actuel 2,26 MD€ /an entre 2017 et 2030. Pour 2014, l’Etat a décidé que sa subvention à l’AFITF passera de près de 660 M€ en 2013 à 334 M€ en 2014. Soit un impact de 326 M€. Si l’on ajoute les effets de la suspension de l’écotaxe qui devait être affectée à hauteur de 500 millions d’euros à l’AFITF en 2014 (750 M€ en année pleine), ce sont plus de 800 millions d’euros qui n’iront pas à la construction et à l’entretien de lignes ferroviaires, routes, transports en commun, maritimes ou fluviaux en 2014.
Réduction des dotations aux collectivités locales
En 2014, la baisse des dotations de l’Etat aux communes et intercommunalités sera de 840 M€. Si cette chute touche l’épargne brute des collectivités, elle diminuera d’autant leur capacité d’investissement. Or 41% de celui-ci était dédié aux Travaux Publics en 2012. L’impact sera donc de 350M€ pour le secteur des TP.
Le cumul de ces décisions a pour conséquence une perte de 1,2 Md€ d’activité pour les Travaux Publics, soit 3 points de chiffre d’affaires.
Deuxième type de décisions de l’Etat, celles qui touchent l’environnement réglementaire et la hausse des charges. Quelques exemples :
Ces choix sont lourds de conséquence pour les entreprises de Travaux Publics et leurs salariés mais plus globalement pour l’économie française.
Pour 2014, nous anticipons une baisse de 12 000 emplois, c’est-à-dire supérieure à la baisse de l’activité car l’accumulation d’années de récession ne peut que conduire à une accélération des disparitions d’entreprises avec une amplification sur l’emploi et les conditions de réalisation de l’activité vont obliger les entreprises à des gains de productivité importants.
Au-delà des pertes directes pour les tissus économiques locaux (l’équivalent de 4 fermetures d’usines automobiles comme PSA Aulnay), le manque de vision sur le plan des infrastructures aura des conséquences graves sur l’ensemble de l’économie française. Notre pays a jusqu’à présent attiré massivement des investissements étrangers et occupait une place honorable dans les classements en termes de compétitivité et d’attractivité. Mais cette position est fragile et la situation française se dégrade.
La France perd des places chaque année dans le Global Competitiveness Report du Forum Economique Mondial, passant de la 15ème place (en 2010) à la 23ème en 2013 sur 148 pays. Mais elle se trouve en 6ème position mondiale pour la qualité générale de ses infrastructures, 2ème pour ses routes et 4ème pour ses chemins de fer. La qualité de ses infrastructures est ainsi l’un des rares domaines dans lesquels elle se situe encore dans le top des classements.
Or, La qualité de nos infrastructures se dégrade :
Canalisations :
SOURCE : Onema
Routes :
Électricité :
SOURCE : Commission de régulation de l’énergie (CRE).
Ouvrages d’art :
SOURCE : STRRES (Syndicat National des Entrepreneurs Spécialistes des Travaux de Réparation et de Renforcement des Infrastructures).
Malgré cette avalanche de péril, les professionnels des Travaux Publics veulent croire que cette situation est réversible.
De nombreux besoins existent et certains maîtres d’ouvrage l’ont compris. Nous avons voulu en apporter la preuve en proposant des visites de chantiers dont les premières se déroulent cette semaine. Ces « cinquante chantiers pour le futur » montrent la variété des besoins et les apports de notre profession à la qualité de vie des citoyens, à l’attractivité économique des territoires, à l’emploi, au développement durable, à l’innovation. Rendez-vous sur www.on-n-arrete-pas-le-futur.com pour les découvrir.
D’autres exemples récents nous montrent que lorsque la volonté politique existe, les projets peuvent devenir réalité. En témoignent le Grand Paris avec des travaux attendus à partir de 2015 ou le GPSO (Grand Projet Ferroviaire du Sud Oust - LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax).
Nous sommes convaincus que nous sommes entrés dans une ère d’optimisation de l’investissement, ce qui n’empêche pas l’innovation en matière de financement ou d’allocations des ressources. C’est le sens des « Propositions pour l’investissement public en infrastructures » que nous allons rendre publiques à l’occasion du Salon des maires le 19 novembre prochain et qui concerneront :